ANALYSE PHOTO : "RETAIL" - BRIAN ULRICH

CONTEXTE

Brian Ulrich est un photographe américain né à New York en 1971. Il est notamment connu pour ses photographies traitant de la culture de consommation en Amérique. Il a jusqu'alors réalisé cinq séries de photographies : "Retail", "Thrift", "Dark Stories", "Great Prosperity" et "Centurion". Cette photographie n'a pas d'intitulé mais elle appartient à la série "Retail". Il a commencé à réaliser celle-ci suite aux événements ayant eu lieu le 11 septembre 2001. L'appel lancé par le gouvernement américain à ses citoyens, les invitant à aller dans les centres commerciaux pour soutenir l'économie du pays, a poussé Brian Ulrich à se rendre dans ces derniers pour photographier l'attitude des clients. Cette photographie a été réalisée dans un magasin à Chicago, en 2003, durant le Black Friday (le lendemain du Thanksgiving qui marque traditionnellement le début de la période des achats des fêtes de fin d’année).

CADRAGE

Cette photographie a été cadrée horizontalement. Le format "paysage"est idéal pour donner une impression de calme et de profondeur. Il permet ici de nous offrir une vision générale de la scène photographiée.

PROFONDEUR DE CHAMP

Sur cette photographie, l'arrière plan n'est pas très visible car il est caché par les infrastructures architecturales du premier plan mais le peu visible est relativement net. Cette forte profondeur permet de mettre en exergue les lignes de forces.

PLAN

Nous sommes ici face à un "plan d'ensemble" qui nous permet d'avoir une parfaite visibilité de la scène.

COULEURS

Il s'agit d'une photographie en couleurs. Les couleurs prédominantes sont le blanc et le noir.

COMPOSITION INTERNE

LA RÈGLE DES TIERS

La règle des tiers n'est ici pas totalement respectée mais nous pouvons voir que l'un des points forts du “rectangle des tiers” coïncide avec l'intersection de deux escalators.

LES LIGNES DIRECTRICES

Cette photographie est empreinte de multiples lignes obliques. Par ailleurs, celles-ci, provoquées par l'alignement des escalators, lui confèrent un rythme dynamique. Elles donnent une sensation de mouvement, d'ascension.

LA LUMIÈRE

La lumière sur cette photographie est artificielle et diffuse.

NETTETÉ

La mise au point semble avoir été faite au niveau du point de croisement des escalators se situant sur l'un des points forts du "rectangle des tiers".

ÉLÉMENTS DE DÉNOTATION

Sur cette photographie, nous pouvons voir de nombreuses personnes monter ou descendre les escalators d'un magasin en tenant, pour la plupart, des poches par la main. À l'arrière-plan, il est possible de voir les vêtements exposés. La majorité des clients présents sur les escalators porte des vêtements noirs tandis que les éléments architecturaux du magasin sont blancs. Les quatre escalators se trouvant sur cette scène s'entrecroisent les uns les autres et laissent émerger une forme de losange au centre de la photographie. Les clients du magasin ont des regards "vides" et "absents".

ÉLÉMENTS DE CONNOTATION

Le fait que presque tous les gens dans le magasin tiennent des poches en leurs mains témoigne de leur amour pour l'achat, pour la consommation. De par le regard vide de ces derniers et leurs vêtements sombres, ils nous apparaissent comme étant “abattus” par l'environnement au sein duquel ils se trouvent. La couleur noire de leurs vêtements qui évoque les ténèbres et la tristesse est en opposition totale avec la couleur blanche des infrastructures du magasin qui renvoie à la paix, à l'innocence et à la pureté. Le magasin me paraît profiter de la couleur de ses infrastructures pour pousser les clients “zombifiés” à consommer. Ces derniers paraissent anéantis par leur addiction à l'achat et se fondent dans la masse. En perte d'identité, ils ne semblent connaître que le culte de l'achat, de la possession.

Le losange représente quelque chose que l’on souhaite protéger du monde extérieur. Le fait que les escalators s'entrecroisent les uns les autres et laissent émerger une forme de losange me porte à croire que le magasin ne souhaite non pas protéger ses clients, mais plutôt, au contraire, les couper du monde extérieur. Par ailleurs le losange inspire également la notion de cycle. Ici les clients sont embrigadés dans un cycle d’achat; ils consomment sans pouvoir s'arrêter ou sortir du cycle. Cette photographie constitue donc une parfaite critique de la société de consommation, du culte de l’"avoir".