ANALYSE PHOTO : "THE ARTIFICIAL BEACH" - MARTIN PARR

CONTEXTE

Martin Parr est un photographe britannique né le 23 mai 1952 à Epsom. Il fait partie de la coopérative photographique "Magnum Photos" depuis 1994. Il est reconnu pour ses photographies empreintes de dérision et d'ironie. L'ensemble de son oeuvre s'inscrit dans le registre de la photographie documentaire. La majorité de ses photographies dépeint le déclin social et moral de la "classe moyenne" anglaise avec une certaine pointe d'humour. La photographie "The artificial beach inside the ocean dome" a été réalisée en 1996 au Japon (Miyazaki). Elle appartient à sa série intitulée "Small World !" qui aborde le thème du tourisme de masse.

CADRAGE

La photographie est cadrée horizontalement (format "paysage"). Ce cadre donne une impression de calme, de profondeur et de distance. Il convient ici tout à fait à la prise de vue générale de la scène (du paysage et des groupes de personnes). Ce cadre a ici été utilisé par Martin Parr car il ne souhaitait pas se focaliser sur un élément particulier mais bel et bien sur la totalité de la scène. Il désirait nous permettre de visualiser l'image selon une vision humaine (regard balayant l'espace de gauche à droite).

PROFONDEUR DE CHAMP

Toute la photographie est nette. Le choix de cette forte profondeur de champ peut s'expliquer par le fait que l'arrière-plan est tout aussi significatif que le premier plan (voire même davantage). Sa visibilité nous permet de mieux comprendre le contexte de la scène et son intérêt.

PLAN

Nous sommes en présence d'un "plan d'ensemble" qui offre une parfaite visibilité du paysage.

COULEURS

Sur cette photographie, il est possible de noter la présence d'une multitude de couleurs (la plupart étant très "vives"). Une couleur semble toutefois être prédominante : le bleu.

COMPOSITION INTERNE

LA RÈGLE DES TIERS

La règle des tiers n'est pas respectée sur cette photographie. Aucun élément majeur n'est situé au même niveau que les lignes horizontales ou verticales du "rectangle des tiers". De même, aucun n'est localisé au niveau des points forts.

LES LIGNES DIRECTRICES

Nous pouvons noter, sur cette photographie, la présence de nombreuses lignes obliques provoquées par l'alignement des serviettes sur la plage qui lui donnent un rythme dynamique et une certaine profondeur et perspective. Quelques lignes horizontales viennent toutefois à leur intersection pour évoquer un sentiment de calme. Un point de fuite se détache au niveau du ciel peint sur le mur à l'arrière-plan.

LA LUMIÈRE

Sur cette photographie, la lumière est artificielle, forte et diffuse. Il y a beaucoup de contrastes. Le premier plan semble très éclairé tandis que l'arrière-plan, lui, l'est un peu moins.

NETTETÉ

La mise au point semble avoir été faite au niveau du groupe de personnes situé au centre du premier plan de la photographie.

ANGLE DE PRISE DE VUE

La photographie a été prise en situation de "plongée". Celle-ci a tendance à écraser les sujets photographiés et elle permet de donner, ici, une atmosphère de contemplation.

AXE DE PRISE DE VUE

La photographie a été réalisée selon un axe "¾ face gauche". En effet, le sujet n'est pas complètement photographié de face ni de profil. Cet axe permet de donner une sensation de profondeur à la photographie. Par ailleurs, grâce aux contrastes produits par la lumière artificielle, cet axe permet de ne photographier que certains éléments du sujet (son bras et sa jambe) et non pas son entièreté.

ÉLÉMENTS DE DÉNOTATION

Sur cette photographie, nous pouvons voir une foule de personnes amassée sur une plage. Celle-ci est entièrement artificielle. On aperçoit d'ailleurs le toit du bâtiment au sein duquel est présente cette plage, en haut de la photographie. À l'arrière-plan, nous pouvons voir que l'étendue de la mer artificielle est limitée par la présence d'un mur dont la peinture représente un ciel bleu quelque peu nuageux. De part et d'autre de la photographie sont également présents, selon une symétrie verticale, de faux rochers surmontés de palmiers ou de bâtiments factices. La foule de gens est aussi dense sur le sable que dans la mer. Sur cette photographie, nous pouvons également remarquer que plusieurs individus arborent les mêmes maillots de bain ou disposent de serviettes de bain similaires. Il est aussi intéressant de noter que, d'après mes recherches, cette plage artificielle n'est située qu'à quelques kilomètres d'une véritable plage.

ÉLÉMENTS DE CONNOTATION

Les contrastes produits par la lumière artificielle ainsi que l'angle de prise de vue et le cadrage permettent de facilement s'apercevoir de l'aspect factice de cette "plage". Enfermée par un toit, elle s'apparente d'ailleurs davantage à une grande piscine couverte. La foule de gens présente est si dense qu'il est assez difficile de distinguer le sable ou même la mer. L'angle de prise de vue et le cadrage ne font d'ailleurs qu'accentuer cette compacité. Cette photographie me semble donc traiter du tourisme de masse, et plus particulièrement encore, de son absurdité. En effet, alors que tous ces individus pourraient se rendre sur une vraie plage, ils préfèrent s'entasser au sein d'une piscine factice prenant l'apparence d'une plage quelconque. La photographie me paraît donc dénoncer le fait qu'aujourd'hui les gens préfèrent se complaire d'un leurre, d'une fiction, peut-être facile d'accès, plutôt que du réel dont l'approche requerrait sûrement plus d'efforts. L'Homme ici dépeint est donc fainéant; il se contente de la facilité. Les plages sont des lieux très prisés par les touristes. Ces derniers semblent donc ici préférer se rendre dans un lieu connu (la piscine) plutôt qu'aller à la rencontre d'un lieu naturel qui leur est peut-être plus inconnu (la plage).

Par ailleurs le fait que plusieurs individus possèdent des maillots de bain ou des serviettes similaires laisse à penser que Martin Parr critique également, à travers cette photographie, la consommation de masse; et plus particulièrement encore, la dépersonnalisation, la standardisation des goûts.

Les décors factices de cette scène ainsi que les forts contrastes et les couleurs très vives produits par les jeux de lumière donnent à cette photographie un certain aspect publicitaire. Alors que les photographies publicitaires courantes dépeignent des plages quasi-désertiques, la photographie de Martin Parr représente ici le côté moins idyllique de ces lieux (remplis de monde). Cette photographie semble donc faire la publicité du consumérisme et du tourisme de masse; ce qui est, me semble-t-il totalement ironique.

AVIS

Cette photographie me paraît intéressante de par les thèmes qu’elle aborde au travers d’une scène qui, pourtant, aujourd’hui, nous semble presque banale. L’esthétique utilisée contribue fortement à nous permettre de comprendre l’intérêt de la photographie.